Dialogue ou Agression ?
Il me semble qu'un être humain a forcément une conscience limitée de lui-même et du monde dans lequel il est : d'une part, il n'a pas accès à toutes les informations et, d'autre part, même si cela était le cas, il n'a pas la capacité à s'en faire une idée, une représentation, une image en lui qui puisse être assez puissante, assez complète pour rendre compte de tout et de toutes les relations qu'il y a entre toutes les parties du tout. En un mot, la conscience d'un être humain est limitée.
C'est "bateau" n'est-ce pas ? Cela semble tellement "évident" que c'est presque "une perte de temps" d'écrire et de lire ce propos !
... et pourtant, j'ai bien l'impression que, nous avons bien trop souvent tendance à nous comporter comme si cela n'était pas le cas du tout ! Tout semble se passer comme si nous regardions quelque chose de nouveau rapidement pour nous en faire une idée et qu'ensuite nous étions persuadé d'avoir "tout compris de cette chose" en oubliant complètement le paragraphe précédent qui nous semble tellement "aller de soi" !
Prenons un exemple concret.
Vous n'avez jamais eu l'impression que des gens n'avaient pas la patience de vous écouter jusqu'au bout quant vous exprimiez un avis sur un sujet et vous coupaient la parole au bout de quelques mots en étant persuadé d'avoir déjà compris (à tord) ce que vous alliez dire avant que vous ayez eu le temps de le dire ?
Et bien, est-ce que le sujet, dont les personnes en question se sont fait une idée (trop) rapidement ne serait-ce pas : "vous" ? Ne pensent-ils pas qu'ils vous ont complètement compris (définitivement), s'être fait une idée suffisamment complète de "qui vous êtes" pour pouvoir deviner, après quelques mots, ce que vous alliez dire et le sens même des mots que vous employez sans avoir besoin de prendre le temps de vous écouter et de réfléchir à ce que vous alliez dire ?
Je prends cet exemple, parce qu'il me semble que cela nous arrive tout le temps d'éprouver ce genre de chose comme cela nous arrive tout le temps d'avoir ce genre de comportement envers l'autre ! Je ne sais pas (évidemment) ce qu'il en est pour vous mais, en ce qui me concerne, je constate que je suis souvent pris entre l'envie d'expliquer précisément mon point de vue dans le détail afin qu'il soit bien compris et la précipitation dans mon explication par peur qu'on me coupe la parole avant d'avoir pu exprimer quoi que ce soit !
C'est assez terrible parce que le sentiment qui prédomine en moi dans ces moments, c'est la peur (que l'on me coupe la parole), que l'on déforme mes propos et cette émotion est telle que j'en arrive à perdre le fil de ce que je suis en train de dire, ce qui rajoute encore à la confusion... Je me comporte alors comme "en terrain ennemi". Aucun dialogue véritable n'est possible dans ces conditions ! C'est "perdu d'avance" !
Tout semble souvent se passer comme si "parler" était un "combat" en permanence avec des "ennemis" qui cherchent chacun à "avoir la parole" pour imposer "la vérité" et que la moindre question posée était un crime de "lèse-majesté", une offense, à la personne qui vient de dire quelque chose !
On n'est pas dans le "domaine du dialogue" mais dans celui des "réactions psychologiques" (effectivement : du combat).
N'est-il pas évident que l'image du monde que nous nous faisons chacun est, par nature, personnelle, unique, seulement propre à nous-même et que "se parler", "dialoguer" devrait être le moyen privilégié d'échanger ensemble sur nos représentations du monde personnelles afin de les améliorer ensemble pour qu'elles soient plus proches de la Vérité (c'est à dire de la réalité, du monde qui est véritablement) en profitant ainsi, du point de vue unique que nous avons chacun de part notre propre nature unique à chacun et de notre expérience unique également à chacun ?
Oui mais, pour cela, ne faut-il pas que nous ayons compris chacun que nous sommes tous et toutes, par nature, fondamentalement différentes et différents et que, du coup, le point de vue de chacun et chacune est potentiellement intéressant de par le fait qu'il est unique justement ?
Du coup, n'est-ce pas notre propre état d'esprit qu'il faut interroger avant même de dire quoi que ce soit ou d'écouter quoi que ce soit ? Suis-je là pour "m'affronter" aux autres ou pour faire évoluer mon image du monde en la comparant à l'image du monde des autres ?
Évidement, si je pense consciemment ou non, que j'ai "tout compris", que "je sais", je fais juste semblant de parler avec les autres, Je joue le rôle de celui ou celle qui "dialogue" mais en fait je suis déjà dans l'agression puisque je considère que l'autre est un "ennemi" à tuer puisque la représentation du monde qu'il se fait en lui-même ou en elle-même n'est "rien" et qu'elle doit céder la place à la mienne propre ou bien que l'autre est "trop con" et, en fait, je vais la mépriser ou le mépriser... En fait, je la ou le méprise déjà au départ, avant même qu'il ou qu'elle ouvre la bouche puisque je ne considère pas vraiment un instant qu'il ou qu'elle puisse dire quoi que ce soit qui m'intéresse un tant soit peu !
Alors, que faire ? Comment s'y prendre pour que le Dialogue soit possible ?
Peut-être qu'il faut s'interroger d'abord sur les "conditions du dialogue" avant même de se parler et abandonner toute idée de dialogue si elles ne sont pas remplies. D'abord, arriver à être dans l'état d'esprit propre au dialogue et attendre que l'autre le soit aussi et "ne pas essayer" tant que l'autre est dans un état d'esprit agressif !
Si je ne suis pas dans agression peut-être que l'autre va finir par "rendre les armes" et si l'autre ne veut pas, et bien : tant pis ! Cela ne sert à rien d'essayer de forcer l'autre à quoi que ce soit car cela serait forcément une agression.
Le dialogue n'aura pas lieu tant que les deux personnes (ou plus) sont dans l’agression !
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